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Alerte du CSA : sur Twitter, la viralité profite plus aux fausses informations

publié le 21/04/2021

Comment expliquer la viralité des fausses informations sur le réseau social Twitter en France ? Dans une étude intitulée « La propagation des fausses informations sur les réseaux sociaux : étude du service Twitter », publiée fin novembre 2020, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) apporte un éclairage sur ce phénomène. Analysant les caractéristiques et activités de différents comptes francophones, certains diffusant des informations erronées et d’autres spécialisés dans la vérification de faits (fact-checking), le CSA met en lumière le caractère souvent vain du travail de fact-checking mené par les journalistes (AFP Factuel, CheckNews de Libération, ou les Décodeurs du journal Le Monde). Dans la plupart des cas, ce travail ne permet pas de mettre un terme à la circulation des fausses nouvelles identifiées.Logo Twitter et fake news : sur Twitter, la viralité profite plus aux fausses informations

Des émetteurs de fausses informations peu nombreux, mais très bien relayés

Selon le CSA, sur Twitter, la propagation de fausses informations s’explique avant tout par l’hyperactivité des abonnés (followers) aux comptes qui les diffusent initialement. Ces comptes possèdent un nombre d’abonnés « significativement plus faible que la majorité des comptes d’information fiables ». En moyenne, les comptes catégorisés comme « douteux » enregistrent 85 000 abonnés, tandis que ceux « diffusant des fausses informations » rassemblent 14 000 abonnés. En comparaison, les comptes fiables peuvent compter sur 500 000 abonnés. En outre, de nombreux comptes peu fiables possèdent une « proportion significative d’abonnés communs », même si cela ne se traduit pas par l’émergence de « chambres d’écho » ou « bulles de filtre ». En effet, leurs abonnés ne suivent pas uniquement des comptes relayant de fausses informations : plus de 80% suivent au moins un compte fiable. Ce déficit d’abonnés est compensé par un haut niveau d’engagement. Les followers des comptes peu fiables génèrent ainsi « 10 à 20 fois plus » de retweets que ceux des comptes fiables.

La dynamique contraire est observable entre l’activité des comptes peu fiables et celle des comptes spécialisés dans le fact-checking. Bien qu’ils soient plus suivis, ces derniers peinent à mobiliser. Leurs publications génèrent moins d’interactions communautaires que celles des comptes propageant de fausses nouvelles. Selon le CSA, cela s’explique notamment par le fait que diffuseurs de fausses nouvelles et vérificateurs ne traitent pas des mêmes sujets.

Impuissance ou erreur des fact-checkers dans le choix des sujets

Ayant pour objectif de susciter des interactions et réactions (doutes, critiques, etc.), les tweets des comptes diffusant de fausses informations sont majoritairement consacrés à des thématiques « d’actualités et liés à des sujets clivants » : politique (16% de l’échantillon), immigration (10%), santé (10%), religion (8%) et terrorisme (6%). Sur le plan sémantique, les termes « liés à la délinquance, l’immigration, Israël et la Palestine, la pédophilie, l’islam ou encore la franc-maçonnerie » y sont surreprésentés. Or, la plupart de ces thématiques (immigration, santé, terrorisme) sont très peu investies par les journalistes, qui se concentrent davantage sur des sujets en lien avec leur métier (actualité des médias, éducation à l’information). Seuls les sujets politiques et religieux sont également traités par les deux types de comptes. Aussi, les fact-checkers captent moins l’attention des internautes sensibles à la désinformation. Même lorsqu’ils réagissent rapidement, les « vraies » informations ne « chassent pas les fausses », qui restent majoritaires dans les discussions qui génèrent le plus de tweets.

Ce travail de recherche illustre la nécessité, pour les médias qui s’attellent à la vérification d’informations, de dynamiser leur communauté. Cette dernière ne doit plus être considérée comme un simple récepteur de l’information, mais comme un partenaire actif. C’est en effet très largement de sa capacité à relayer une information vérifiée, afin de la rendre dominante dans les discussions, que dépend la réussite d’une campagne de lutte contre la désinformation. Ce renouvèlement de l’approche communautaire doit aller de pair avec un recadrage des sujets traités par les fact-checkers. Il est ainsi indispensable, pour espérer atteindre les internautes sensibles aux fausses informations, qu’ils ciblent davantage les thématiques les plus en vogue (immigration, santé, terrorisme) au sein des groupes qui en sont à l’origine. Une telle mutation pourrait cantonner la visibilité des fausses informations à des cercles plus restreints.

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